16.06.2019

Risques auditifs Enseignement Interview

Sciences + musique = Loga-Rythmes

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Interview

Apprendre les Mathématiques, les Sciences et Vie de la Terre (SVT) ou la Physique grâce à la musique, c’est possible ! Une occasion toute trouvée pour intégrer des messages de prévention des risques auditifs. Découvrons comment la Fédération Hiero Limoges instaure cela auprès d’élèves de Première Scientifique, avec Jérémy Galliot, en charge du projet Loga-Rythmes.

 

Pourriez-vous nous présenter le rôle qu’exerce la Fédération Hiero à Limoges ?

Créé en 1997 par le regroupement de tous ceux qui faisaient bouger la musique à Limoges, Hiero est avant tout l’organisateur d’une trentaine de concerts par an. Trois autres activités sont au cœur du projet : la Discomobile [accompagnement à la professionnalisation de groupes], la MAnet [lieu info et conseil pour les porteurs de projet musiques actuelles] et Du Son Pour l’Audition [éducation au sonore].

 

Quels types d’interventions menez-vous dans les établissements scolaires ?

Nous avons plusieurs actions dans le dispositif Du Son Pour l’Audition : les malles Son Audition pour intervenir en primaire ; les expositions Phonographe.mp3 qui abordent ces sujets du point de vue de l’évolution des supports audio ; les concerts pédagogiques au secondaire ; des interventions in-situ avec des salariés formés à ces questions ; et le SoundPark, sur lequel un fingerskate muni d’un sonomètre permet de se balader dans le monde des sons.

 

Que doivent la musique et le monde sonore aux sciences ?

Déjà que des instruments s’accordent ! Quand on ne connaissait que les nombres rationnels, on pouvait par exemple accorder des instruments à la quinte (ce qui fait multiplier la hauteur d’une note de 3/2), sauf qu’à force de monter des quintes, l’octave est fausse. L’invention des nombres irrationnels comme les racines carrées a permis l’apparition de la gamme tempérée telle qu’on la connaît aujourd’hui sur un piano, où les octaves sont justes et on les a divisés en 12 demis-tons : quand on passe d’une touche du piano à la suivante, on a monté la fréquence de ¹²√2.

L’évolution des musiques actuelles est intimement liée aux sciences et aux technologies : sans guitare électrique pas de Rock, sans sampler pas de Rap !

 

Comment Loga-Rythmes met des modules de sciences au service de la prévention des risques auditifs ?

Le programme d’enseignement scientifique en classe de première comprend 12h intitulées « Son et musique, porteurs d’information ». Comme expliqué plus haut, on y parle de Mathématiques, mais aussi de Physique avec les décibels, de SVT avec l’oreille et d’Informatique avec l’encodage en MP3. Il aurait été impensable de ne pas insérer de message de prévention des risques auditifs !

 

Quelle application concrète apportez-vous aux sujets abordés ?

Une série de capsules vidéo réalisée autour d’un artiste de musiques électroniques présentera la création d’un morceau de musique utilisant chaque notion scientifique : quelle gamme choisir, quelle hauteur, quel timbre, quel volume, qu’est-ce que je veux provoquer dans l’oreille de l’auditeur, comment je gère ma dose de son dans mon travail (etc.) ?

En plus de l’écriture de séquences de cours réalisées par des enseignants en notre présence, les classes de première bénéficieront librement de ces vidéos, contribuant à rendre plus attractif des disciplines qui n’ont pas toujours la cote auprès des jeunes générations.

 

Avec quels acteurs avez-vous imaginé un tel projet ?

L’idée est venue lors d’une discussion avec un enseignant-chercheur membre de l’IREM (Institut de Recherche sur l’Enseignement des Mathématiques), au cours d’événements de cultures scientifiques auxquels nous participions grâce à Récréasciences, un des CCSTI (Centre de Culture Scientifique Technique et Industrielle) de la région. Un faisceau d’événements à provoqué cette action : un apport financier de Cap Sciences qui a des moyens bien supérieur à notre CCSTI local, une rencontre avec Grand Ciel, artiste de musiques électroniques volontaire dans ces démarches, ainsi que l’opportunité de ces nouveaux programmes de Sciences.

 

Comment l’efficacité de cette action sera évaluée ?

Il est évident que si les enseignants n’utilisent pas nos supports pédagogiques, ce sera un échec. Nous analyserons leurs retours après les avoir formés lors d’un stage, dans le cadre du Plan Académique de Formation. Il s’agira aussi de sonder l’efficience de cette collaboration entre un laboratoire de l’université, des enseignants de l’Éducation nationale, un organisateur de concert, un artiste et des médiateurs scientifiques. Le tour de table en lui-même sera déjà une expérience.

Nous étudierons aussi des retours du grand public, car une borne interactive sera créée avec les capsules vidéo réalisées et des événements grands publics verront le jour, à l’image de l’afterwork « Ondes Sonores ».

 

Quelle est votre avis sur le nouveau chapitre « Sciences et sons » impulsée par l’Éducation nationale aux classes de première ?

Les programmes sont sortis il y a plusieurs mois, des livres scolaires existent, mais nous savons que des contenus créés et validés en quelques mois ont des imperfections. D’un point de vue plus militant, une certaine résistance existe à juste titre auprès des enseignants, puisqu’en regroupant quatre matières différentes en « enseignements scientifiques », on pourrait demander à un professeur de SVT d’assurer le cours de Mathématiques plutôt que de créer un poste.